Actualitté - 26/06/2017
Machine arrière : la vie poétique de Samantha Barendson
Cécile Pellerin - Livre - Poésie - femme - quotidien
Avec Samantha Barendson, l’auteure du Citronnier (Le Pédalo ivre), la poésie n’offre pas de résistance, immédiate, pure et éclatante. Même le lecteur rétif, plus habitué à la prose, reste admiratif et conquis par l’histoire narrative qu’il voit défiler sous ses yeux.
Un jour
c’est à moi
de mourir
d’entrevoir
ma fin
d’imaginer
le pire
quand
le médecin
me dit
qu’il a trouvé
« quelque chose »
En peu de mots, avec une précision stupéfiante, il accompagne avec ardeur et émotion, les morceaux choisis de la vie de cette femme, ses souvenirs, de l’enfance à l’adolescence puis de la maternité à aujourd’hui.
A dix-huit ans
moins quelques jours
j’étais enceinte […]
A dix-huit ans
moins quelques jours
j’ai décidé d’avorter
Des petites touches, qui, l’air de rien, atteignent l’universel, à la fois troublantes et apaisantes, mélancoliques et intimes, d’une infinie justesse. Proches et essentielles, elles content la vie, la mort, la douleur, l’amour, la peur, la maladie, la solitude, la séparation, sans prétention mais avec grâce.
Une limpidité exaltante.
La serveuse
a cinquante ans
elle me sert
un café
Elle est triste
fatiguée
usée
lasse
La serveuse
c’est moi
dans trente ans
Je démissionne
je reprends
mes études
Une poésie simplement vivante, vibrante, idéale, adaptée, contemporaine et chaleureuse. A travers ses mots, Samantha Barendson, traverse notre propre vie, mais sans indiscrétion, capte les instants fragiles avec légèreté. Un frôlement déroutant, rare et précieux. Une belle consolation.
Aussi, savourez cet ouvrage plusieurs fois sans risque d’effritement. Quelle secousse ! Mais, “Ce n’est rien / Qu’un tremblement de l’air”.